Reconnaître la faïence de Delft

Les techniques de fabrication

Parmi toutes les régions faïencières qui émergent en Europe au XVIIe siècle, Delft est l’une des plus célèbres. Les collectionneurs de céramiques anciennes recherchent toujours ces objets précieux confectionnés durant l’âge d’or des manufactures hollandaises. Installés un peu partout sur le territoire de Delft, les artisans veulent imiter les porcelaines venues du Japon et de Chine rapportées par les Compagnies des Indes, sans en connaître les secrets de fabrication. Au lieu d’utiliser de la porcelaine blanche contenant du kaolin, ils mélangent de la terre de Tournai, du Rhin et de Delft pour former une pâte de faïence beaucoup plus légère. Une fine couche de vernis appelé kwaart est appliquée sur les objets finis. Naît alors la faïence de Delft, unique par sa brillance inimitable et son émail particulièrement solide, qui ne s’écaille pas.

Les décors et les particularités

Les motifs peints, notamment les motifs floraux, les scènes de vie à l'européenne, les paysages avec des moulins et les vues maritimes, sur une faïence de Delft sont cernés d’un fin trait noir pour marquer leur ligne. Cette forme de décoration à l’européenne, dite « contournée » est présente sur quelques pièces emblématiques et recherchées par les amateurs de cette faïence. Le musée Geelvinck-Hinlopen d’Amsterdam présente notamment de précieux vases au décor doré et camaïeu bleu, parmi les plus rares issus de Delft.

Les objets sont aussi reconnaissables à leur surface très lisse. La plupart des pièces de Delft possèdent un fond blanc pour souligner la brillance exceptionnelle de l’émail. Certaines sont toutefois caractérisées par un fond coloré, notamment noir, marron et bleu turquoise. Une théière de la manufacture Grieksche A. est notamment exposée au Rijksmuseum de Delft. Il s’agit d’une pièce très rare fabriquée entre 1705 et 1720.

D’autres faïences de Delft sont bicolores, le plus souvent en bleu et blanc, notamment au début du 17e siècle. Ce décor sinisant inspiré des pièces de porcelaine d’Extrême-Orient au décor chinois, nécessite une précision minutieuse dans les gestes pour peindre les motifs sur de l’émail encore cru. Les vases bleus de Delft de forme balustre, au couvercle sommé du lion de fo sont de beaux exemples de ces couleurs distinctives. Ce modèle intemporel a été repris de façon contemporaine par le designer néerlandais Marcel Wanders dans sa collection de faïence pour la manufacture Royal Delft en 2007-2008, prouvant leur succès encore actuel.

Le décor polychrome de grand feu, avec du bleu de cobalt, apparaît dans les années 1670. À la fin du siècle, de nouvelles teintes sont ajoutées, le rouge, le jaune, le cuivre et le violet. Cette expansion chromatique enrichit les possibilités artistiques de la faïence de Delft à cette époque.

Le décor de petit feu apparaît vers 1725. Les couleurs sont appliquées sous forme d'émaux, sur de l’émail cuit. Elles sont ensuite fixées lors d'une nouvelle cuisson, appelée « cuisson de petit feu ». Les émaux contiennent un composant vitrifiable qui permet à la couleur d’adhérer à la surface de l'émail. C'est grâce à la cuisson de petit feu que les artisans obtiennent une palette de couleurs variées, dans des tons pourpres, offrant ainsi une polychromie subtile et nuancée.

La valeur de la faïence de Delft

Le répertoire ornemental importe beaucoup dans l’évaluation d’une faïence de Delft. L’expert examine les motifs pour identifier s’ils sont d’influence orientale, européenne ou néerlandaise. Les objets décoratifs orientalisants sont toujours bien vendus en ventes aux enchères, même si leurs prix, leur prix reste raisonnable lorsqu’il s’agit de pièces tardive du XIXe siècle.

Les garnitures, les potiches, et les assiettes au décor d’un oiseau branché se trouvent aussi facilement sur le marché. Les carreaux qui sont une spécialité propre à Delft font aussi l’objet d’une importante production dans les manufactures. Ils sont surtout destinés à décorer les murs, comme ce que l’on peut constater dans la Salle des Tartares au château de Groussay dans les Yvelines. Les murs sont recouverts de 10 000 carreaux en faïence de Delft.

Une trentaine d’ateliers producteurs de faïence de Delft existent déjà au 17e siècle. Les objets issus des grandes manufactures comportent le nom de leur enseigne respective : Pot de Métal, A Grec, au Cerf, au Paon, etc. Les pièces fabriquées dans les petits ateliers peuvent être signées par le maître faïencier qui les a créées.

Différents types de signatures peuvent alors être observés sur les objets :

- le monogramme du marchand propriétaire ;

- la marque du maître faïencier pour les petits ateliers ;

- la marque de l'atelier ;

- le monogramme du contremaître ;

- la signature d'un artiste-peintre.

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Parmi les pièces ayant obtenu des records en ventes aux enchères, citons un ensemble de deux pyramides monumentales en faïence de Delft, en provenance de la collection personnelle du comte Édouard de Ribes, depuis 2 siècles. Probablement fabriquées à la fin du 17e siècle. Leur incroyable état de conservation permet un prix d’adjudication inédit de près de 1 040 000 euros. Elles sont acquises par une institution lors d’une vente aux enchères à Paris en 2019.

Faïence de Delft adjugée chez MILLON

• Une plaque rectangulaire en faïence de Delft restaurée, avec un décor en camaïeu bleu sur le thème de la Passion du Christ, fabriquée au 18e siècle. Cette pièce estimée entre 600 et 800 euros est vendue 1 650 euros en 2020 ;

• Une potiche de forme ovoïde avec un décor en camaïeu bleu d’oiseaux et d’insectes dans des branchages fleuris. La monture est en bronze ciselé et doré de la maison Hopilliart. Le col est souligné d’une frise de feuilles d’acanthe et de godrons. Le couvercle est surmonté d’une pomme de pin. La base est ornée d’un portrait de Louis XVI et d’un tore de laurier. Les pieds à enroulements sont soulignés de feuilles d’acanthe. La faïence date de la fin du 17e siècle et la monture est fabriquée au 19e siècle. Cette potiche est estimée entre 150 et 250 euros, elle est adjugée 2 150 euros en 2022.

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